« Nous ne voulons pas que le débat territorial soit oublié lors du débat national sur la transition énergétique »

, par   Hélène Gassin

L’Ile-de-France a donné le coup d’envoi de sa participation au « débat national sur la transition énergétique » en organisant le 18 janvier à Paris sa première conférence régionale de l’énergie. La transition énergétique, en effet, n’est pas qu’une affaire d’experts et ne saurait rester le domaine réservé d’un pouvoir centralisé : la société civile comme les collectivités locales doivent être pleinement associées au processus.

Hélène Gassin (interview), La Gazette des communes, lundi 21 janvier 2013

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« nous ne voulons pas que le débat territorial soit oublié
lors du débat national sur la transition énergétique »

L’Ile-de-France a donné vendredi 18 janvier 2013 à Paris le coup d’envoi de sa participation au Débat national sur la transition énergétique (DNTE), en organisant sa première conférence régionale de l’énergie. Pour la vice-présidente (EELV) de la région chargée de l’Environnement, l’Agriculture et l’Énergie, Hélène Gassin, les débats à venir ne doivent surtout pas oublier le citoyen.


Peu de régions se sont à ce jour engagées dans le Débat national sur la transition énergétique (DNTE), un processus par ailleurs largement méconnu des citoyens (1). Comment l’envisagez-vous en Ile-de-France ?

Nous avons conçu un dispositif à plusieurs étages : trois conférences régionales de l’énergie ; neuf débats dans les départements – la Seine-et-Marne en aura deux en raison de sa taille ; des débats territoriaux, à l’initiative, par exemple, de collectivités, d’agences locales de l’énergie ou de réseaux associatifs, que nous labelliserons et accompagnerons en leur fournissant un soutien logistique, aide à la synthèse.

Il faut valoriser les projets dans les territoires car nous avons bien conscience de nos limites : le « citoyen ordinaire » ne vient pas aux manifestations se tenant dans l’hémicycle régional… Je serais donc ravie qu’il y ait une multitude de débats sur le territoire.

Ces débats ne seront-ils pas redondants de ceux des États généraux de la conversion écologique et sociale (Ecociliens), qui vous ont occupés pendant deux ans et se terminent dans moins d’un mois, le 13 février ?

Des sujets se recouperont peut-être, comme la rénovation du bâtiment, qui s’invite dans tous les débats, mais les clés d’entrée des États généraux étaient différentes. Et puis, dans les Ecociliens, même si l’on a par moments émis des recommandations extra-régionales, on s’est avant tout adressés aux acteurs régionaux. Cette fois, on va aussi proposer les réponses de notre territoire aux questions nationales posées par le gouvernement, parce qu’il est important que l’Ile-de-France s’exprime.

La région affiche en effet son intention de « nourrir » la future loi de programmation sur la transition énergétique, annoncée à l’automne. Vous pensez pouvoir influer sur le futur texte gouvernemental ?

Oui, sinon, on ne s’engagerait pas si volontairement. La réflexion sur la transition énergétique doit aller au-delà du débat d’experts. Les territoires ont des expériences à montrer, à partager. C’est vrai pour toutes les collectivités : les régions, les départements, les communes, les agglos… Beaucoup de gens travaillent depuis des années sur ces questions, ont identifié des freins, des problèmes, qu’ils soient réglementaires, fiscaux ou autres. Il est utile que ces retours de la « vraie vie » remontent au ministère. De même que l’on ne fera pas la transition énergétique sans les citoyens.

Vous siégez au conseil national du débat, dans le groupe de travail Gouvernance et aussi dans le comité de liaison du débat décentralisé, qui s’est réuni mercredi 16 janvier pour la première fois. Pourquoi les associations de collectivités ont-elles insisté pour la création d’une telle instance alors que le DNTE en compte déjà tellement ?

Parce que nous ne voulons pas que le débat territorial soit oublié en cours de route. Et ce, même si les associations de collectivités sont dûment représentées dans le conseil national. Il nous paraissait important d’avoir, à notre échelle territoriale, un lieu de pilotage, d’organisation, de remontée des difficultés, de synthèse.

Quelles sont les spécificités de l’Ile-de-France en matière énergétique ?

Notre région accueille 20% de la population nationale sur 2% du territoire. La densité offre des atouts et présente des inconvénients. Nous consommons moins par habitant que dans les autres régions, notamment grâce à une infrastructure de transports collectifs qui, même si elle est insuffisante, demeure très fournie.

On a aussi beaucoup travaillé sur la rénovation du patrimoine bâti et sur les métiers à développer, notamment sur le logement collectif, et pour cause : la région compte 70% de logements collectifs, une exception par rapport au reste du pays.

Cela signifie aussi que, quand on parle rénovation, on raisonne en millions de logements. Sur les réseaux de chaleur, on a un avantage historique que l’on s’emploie à perpétuer et à dynamiser, le potentiel étant encore très important. Comme en matière de géothermie.

Et les points faibles ?

Les énergies renouvelables, qui représentent moins de 5% de la consommation énergétique régionale. Et en particulier, l’éolien. Pour faire un euphémisme, on peut affirmer que, dans ce domaine, on ne sent pas d’appétence du territoire francilien.

Il va donc falloir, et c’est un enjeu majeur des années à venir, convaincre que l’éolien a sa place, qu’il est utile. En capacité installée, on est aujourd’hui proche de zéro. On défriche. Alors que notre potentiel permet d’envisager jusqu’à 500 MW. On dirait que le vent s’arrête à la frontière administrative de la région. Pourtant, quand il y a du vent en Champagne-Ardenne, il n’y a pas de raison qu’à Provins (lieu d’un projet éolien controversé, ndlr), il n’y en ait pas…


(1) Selon un sondage publié le 16 janvier et réalisé à la demande du Syndicat des énergies renouvelables (SER), 79% des personnes interrogées n’ont pas entendu parler de l’organisation d’un débat public sur la transition énergétique, contre 21% qui se déclarent informés. Alors même que 82% jugent un tel débat « important » voire « prioritaire ». Cette enquête Ipsos a été effectuée sur un échantillon national représentatif de 1 012 personnes.

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