Fessenheim : EDF roule l’État dans la farine

, par   Benjamin Dessus

En échange de la validation du protocole d’indemnisation relatif à une fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim – fermeture par ailleurs fortement remise en cause puisque reportée après les élections présidentielles de mai 2017 – le conseil d’administration d’EDF a obtenu d’importantes concessions de l’État français, relatives en particulier à l’entrée en vigueur des autorisations nécessaires à la poursuite de la construction de l’EPR de Flamanville 3, autorisations qui arrivaient à échéance alors que le chantier est bien loin d’être achevé...


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Bâtie sur une faille sismique et en zone inondable, raccordée au réseau en 1977, Fessenheim est la plus ancienne des centrales nucléaires en service en France...

FESSENHEIM : EDF ROULE L’ÉTAT DANS LA FARINE

Benjamin Dessus, Alternatives Économiques, mercredi 25 janvier 2017

Dans une tribune rédigée avant le vote du conseil d’administration d’EDF (1) sur la fermeture de la centrale de Fessenheim, j’analysais les arguments tous plus bidons les uns que les autres que présentait le comité d’entreprise de la centrale pour tenter de convaincre les administrateurs dits « indépendants » de refuser cette fermeture et l’indemnité proposée par l’État.

Il me semblait en effet peu vraisemblable que ces six administrateurs « indépendants » votent comme un seul homme pour ces dispositions, condition indispensable pour l’emporter, avec la double voix du président.

Apparences trompeuses

À première vue, je me suis trompé. Le Conseil d’administration a bien validé le protocole d’indemnisation qui pourrait conduire, « le moment venu », à la fermeture de la centrale de Fessenheim, ce qui laisse évidemment supposer que la centrale va fermer, mais il s’est bien gardé de statuer sur l’arrêt lui-même. Autrement dit : si jamais on ferme Fessenheim – ce qu’on verra plus tard – voilà la somme sur laquelle vous pouvez compter.

En échange de ce vote, EDF a obtenu deux engagements de la part de l’État :

• L’entrée en vigueur des autorisations nécessaires à la poursuite de la construction de l’EPR de Flamanville 3, qui arriveront à échéance alors que le chantier est bien loin d’être achevé.

• Le redémarrage du réacteur n°2 de la centrale de Paluel (Seine-Maritime), à l’arrêt depuis mai 2015.

Notons à ce propos que si l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a donné son accord pour le redémarrage de Paluel 2 le 12 janvier dernier, c’est une tout autre histoire pour Flamanville, en particulier avec l’affaire de la cuve (2).

Carence de gouvernance

La ministre de l’environnement s’est félicitée publiquement de cet excellent « compromis », qui ne résout évidemment rien sur le fond et reporte la décision de fermeture sine die.

C’est en effet le même conseil d’administration d’EDF qui, quand il aura constaté que toutes les conditions seront réalisées, dont l’ouverture de Flamanville, présentera la demande d’abrogation de l’autorisation d’exploiter de Fessenheim. Au mieux du mieux au prochain conseil d’administration qui comme par hasard, aura lieu en juin prochain, après les élections présidentielles.

Dans cette affaire l’État s’est encore manifestement fait rouler dans la farine par EDF, puisque l’entreprise a obtenu gain de cause sur deux points administratifs qui la préoccupaient (les autorisations de Paluel et de Flamanville) en se débrouillant pour reporter la question de la fermeture après les élections…

Plus généralement cette affaire met en évidence une carence importante de gouvernance. Comment se fait-il que l’État, propriétaire à 85,6% de la société EDF, puisse se trouver totalement démuni pour faire passer ses décisions au Conseil d’administration quand se liguent contre lui sa direction et une partie de son personnel ?

Benjamin Dessus
Ingénieur et économiste, fondateur de l’association Global Chance

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(1) Benjamin Dessus, Fermer Fessenheim ? Vous n’y pensez pas !, Alternatives Économiques, lundi 23 janvier 2017

(2) Benjamin Dessus, EPR : l’histoire d’un désastre, AlterEcoPlus.fr, jeudi 11 juin 2015

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