Nouvelle régulation économique du nucléaire existant Contribution de l’Association Global Chance à la consultation publique

, par   Global Chance

La DGEC consulte sur un projet de nouvelle régulation économique du parc nucléaire existant devant succéder à l’ARENH et dont l’objectif affiché est de protéger les consommateurs français de prix de marchés élevés jugés non représentatifs des coûts d’approvisionnement français tout en assurant également à EDF la couverture de ses coûts quand les prix sont bas.

Introduction

La DGEC [1] consulte sur un projet de nouvelle régulation économique du parc nucléaire existant devant succéder à l’ARENH [2] et dont l’objectif affiché est de protéger les consommateurs français de prix de marchés élevés jugés non représentatifs des coûts d’approvisionnement français tout en assurant également à EDF la couverture de ses coûts quand les prix sont bas.

Il s’agirait de décider que la production nucléaire est un service d’intérêt économique général (SIEG) et qu’il faut donc lier l’ensemble des consommateurs, via leurs fournisseurs et non la puissance publique, au destin du parc nucléaire. Au lieu d’acheter directement l’électricité nucléaire à un prix régulé comme aujourd’hui, les fournisseurs volontaires bénéficieraient du versement de la différence entre le prix de vente effectif et le prix régulé. A contrario, en cas de prix de marché insuffisant, l’intégralité des fournisseurs actifs en France (y compris ceux n’achetant pas d’électricité nucléaire aujourd’hui) devraient compenser EDF.

Le dispositif proposé apparaît notablement disproportionné au regard de ses objectifs et représente non pas une continuité mais une rupture complète avec l’ARENH. Sa faisabilité juridique paraît également bien fragile, notamment du fait d’une asymétrie entre un bénéfice optionnel et un risque obligatoire.
Enfin, le document de consultation ne donnant strictement aucune information essentielle comme les volumes, les niveaux de prix, et l’avenir du parc nucléaire ainsi transformé en SIEG étant aujourd’hui encore totalement opaque, il est bien délicat de mesurer l’impact de la réforme proposée puisque l’on ne sait pas sur quoi elle porte exactement. On peut par contre noter une complexité probablement au moins similaire à celle du mécanisme de capacité avec une kyrielle de décisions et décideurs et autant de sources de contentieux.

Protéger les consommateurs français et améliorer le fonctionnement du marché serait un objectif beaucoup plus atteignable en clarifiant enfin la trajectoire attendue du parc nucléaire, la réalité des enjeux qui pèsent sur lui et en empêchant EDF de se lancer dans une politique industrielle dénuée de sens économique plutôt que de l’y conforter : c’est l’opérateur nucléaire qu’il est urgent de réguler, pas ses prix de vente.

Partie 1 – La loi NOME de 2010 a prévu un cadre transitoire d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) jusqu’à 2025

Commentaires

Le rappel historique sur les fondements du dispositif ARENH est le bienvenu puisqu’il permet de rappeler que ce dispositif visait à préserver pour l’ensemble des Français (particuliers comme entreprises, clients d’EDF et des autres fournisseurs) les bénéfices économiques liés au parc nucléaire que la communauté nationale a financé au travers des tarifs réglementés obligatoires en vigueur lors de sa construction.

Contrairement à ce que l’on a pu lire et entendre depuis quelques années, cela signifiait bien que l’ensemble des clients – y compris ceux des fournisseurs autres qu’EDF - devaient être égaux dans leur accès à l’ARENH. La polémique sur la réplication des écrêtements d’ARENH dans les tarifs réglementés de vente (TRV, tarifs bleus d’EDF et des entreprises locales de distribution) est donc totalement injustifiée car en son absence, il y aurait bien eu rupture de cette égalité d’accès [3].

Par ailleurs, il est bien précisé que ce sont les bénéfices économiques qui sont visés, il est donc naturel que l’ARENH ne soit pas utilisée quand les prix de l’électricité lui sont inférieurs. Là encore, les polémiques sur l’asymétrie du dispositif et la possibilité pour les fournisseurs de ne pas l’utiliser ou de le faire à des fins d’arbitrage ne sont pas cohérentes avec les objectifs et le texte de la loi NOME de 2010.

En effet, l’ARENH ne visait pas à lier les consommateurs français au parc nucléaire dans une forme de communauté de destin « pour le meilleur et pour le pire » mais bien à leur permettre de tirer les bénéfices de leur investissement passé, quand il y en a. Le fait que des fournisseurs puissent faire baisser leurs prix en utilisant l’ARENH comme une option d’arbitrage est donc tout à fait conforme à l’esprit de la loi.

La réforme proposée est donc une modification radicale.

Réponses aux questions


Question 1 : Partagez vous ces constats sur la régulation économique du nucléaire actuelle ?

Il est assez évident et largement démontré que le dispositif ARENH a permis le développement de la concurrence sur le marché de détail comme l’ont souligné la CRE et l’Autorité de la concurrence.

Par contre, il est assez évident aussi que l’objectif de développement de moyens de production était assez antagoniste et peu susceptible d’être atteint. Les conditions de marché et la stabilisation des consommations sont citées comme facteurs limitant les investissements, on pourrait y ajouter le manque de clarté sur la politique énergétique française et ses objectifs : en effet, selon que l’on considère que le parc nucléaire va être globalement prolongé ou pas, les besoins en matière de production ne sont pas du tout les mêmes. Avec un parc de production globalement en surcapacité en Europe et en France (sauf pour certaines périodes de pointe ou de tension), la perspective de l’allongement de la durée de vie du parc nucléaire français et d’un rythme très lent de fermeture de centrales thermiques en Europe, on ne voit pas bien qui prendrait le risque d’investir dans des moyens non soutenus. La vague d’investissements des années 2000 (la capacité de production européenne a augmenté de près de 40% entre 2000 et 2013 quand la production n’augmentait que de 7,5%, révélant donc une surcapacité importante) ayant largement échaudé les producteurs qui tablaient sur des perspectives bien différentes d’évolution du parc existant.

La non actualisation du prix de l’ARENH [4] est une responsabilité partagée de l’ensemble des acteurs. La question du volume et du sens qu’il revêt aurait mérité une réflexion bien plus anticipée. En effet, le volume de 100 TWh a été fixé dans un environnement extrêmement différent où les concurrents d’EDF se partageaient quelques miettes du marché français. Il est curieux qu’un dispositif visant à rééquilibrer les parts de marché n’ait pas prévu que le volume concerné soit indexé. Probablement car ses concepteurs ne pensaient pas que cela allait marcher… ou bien que la consommation globale allait stagner amenant à un partage du stock et pas seulement de son accroissement.

La Cour des comptes relève que le caractère optionnel de l’ARENH « ne permet pas de garantir à EDF que ses charges de production seront couvertes en cas de prix de marché bas ». En effet, mais ce n’est pas son objectif premier. Aucun producteur n’a de garantie de couverture de ses charges quand les prix sont bas. EDF est plutôt mieux loti que la plupart d’entre eux puisqu’il a au moins la garantie sur un volume de près de 270 TWh correspondant à la vente au détail aux petits consommateurs largement moins impactée par les prix de marché, et singulièrement les 140 TWh correspondant aux TRV largement basés sur le prix de l’ARENH. Cette part de marché s’érode lentement mais continue d’être largement prépondérante.

Les dispositifs de soutien existant pour les énergies renouvelables offrent bien entendu des garanties aux producteurs, mais au moment de leur investissement initial. Or le parc nucléaire a déjà été largement financé par les Français, ce qui est bien le sens de l’ARENH. Le parc nucléaire existant doit économiquement plutôt être comparé aux installations renouvelables qui ont atteint la fin de leur période de tarif d’achat garanti et pas aux nouveaux investissements.

Question 2 : Au regard des objectifs poursuivis mentionnés plus haut, une régulation économique vous paraît-elle nécessaire après 2025 ?

Les objectifs poursuivis par le projet de réforme sont multiples et partiellement contradictoires mais ils sont surtout difficiles à appréhender en l’absence de clarification sur l’avenir du parc nucléaire. En effet, selon que l’on cherche à accompagner son maintien, sa décroissance ou son renouvellement… la régulation économique ne peut être la même.
L’objectif affiché de protéger les français de la volatilité de prix de marché déterminés essentiellement par des actifs fossiles et donc les prix des combustibles et du CO2 au niveau européen peut apparaître louable en première lecture mais elle méconnait largement le fonctionnement du dit marché.

Il faudrait en effet clarifier d’abord de quels consommateurs l’on parle puisque pour un particulier ou une petite entreprise, l’électricité ne représente qu’un tiers de la facture, le reste correspondant à l’utilisation des réseaux et aux taxes et contributions. Les gros consommateurs (industriels, grande distribution etc) étant largement exonérés des taxes et coûts de réseaux, sont beaucoup plus sensibles aux prix de marché, mais ils ont également la capacité de négocier des contrats d’approvisionnement de long terme directement avec les producteurs qui ont eux-aussi intérêt à s’assurer des revenus réguliers.

Par ailleurs, la volatilité et le niveau des prix sont certes largement dus aux fondamentaux que sont les coûts d’approvisionnement mais également, voire essentiellement, à l’équilibre offre-demande. Selon que les acteurs anticipent des tensions d’approvisionnement ou pas, les prix des produits dits « calendaires » (à un, deux ou trois ans) ne sont pas du tout les mêmes.
Les pics de prix observés sur les marchés journaliers auxquels fait référence la consultation publique correspondent en général à des déséquilibres temporaires offre-demande mais n’affectent que marginalement les petits consommateurs finals puisque ce sont les fournisseurs qui, justement, utilisent les marchés journaliers pour optimiser leurs approvisionnements de « dernière minute » mais assurent le principal de leurs volumes avec des produits de plus long terme et généralement vendent à des tarifs fixés à l’avance et non indexés. Ils absorbent donc largement la volatilité. Lorsque celle-ci augmente, vendeurs et acheteurs cherchent spontanément à s’en protéger.

En revanche, il est assez évident, que si les pays européens, notamment la France et l’Allemagne, poursuivent des politiques de développement des énergies renouvelables tout en maintenant en fonctionnement les capacités nucléaire ou charbon existante, la tendance sera à la baisse globale des prix pour cause de surcapacité chronique. On peut par exemple citer l’étude sur le financement des énergies renouvelables à l’horizon 2040 [5]d’octobre 2019 qui démontre une sensibilité majeure du niveau des prix… à la capacité nucléaire française.

En clarifiant enfin l’avenir du parc nucléaire, le gouvernement permettrait de notablement améliorer le fonctionnement du marché en permettant à l’ensemble des acteurs de s’adapter. La transparence est en effet un élément essentiel pour que les mécanismes de formation des prix puissent fonctionner.

Le deuxième objectif affiché est d’assurer le financement du maintien en bon fonctionnement du parc nucléaire existant même en période de prix bas. On introduit ici un changement majeur avec l’ARENH : il ne s’agit plus de partager les bénéfices du parc mais également ses risques. Cela paraît plus équilibré mais introduit un biais majeur : la stratégie de production d’EDF et la politique énergétique française influencent les prix de marché et, si l’on supprime les boucles de rétroaction en interdisant à EDF d’adapter sa production, on ne peut qu’aboutir à un système totalement inefficace de production à tout prix par ailleurs tant critiqué pour les énergies renouvelables.

Mais surtout, l’on aimerait savoir de quoi l’on parle : que reste t-il à amortir ? Quels investissements ? Quels coûts de fonctionnement ? Quel productible et quelle capacité installée ? Si l’on se fie au projet de PPE en cours de consultation, il faudrait financer les investissements massifs du grand carénage de l’ensemble du parc (100 milliards d’euros selon la Cour des comptes) en ne les amortissant que sur 10 ans pour les réacteurs de 900 MW et alors même qu’une grande partie de cette production s’avère largement inutile dans beaucoup de scénarios électriques, y compris ceux de RTE. Les Français ont-ils envie de garantir le financement d’une politique industrielle aussi inefficace ?

Si l’on veut lier l’ensemble des consommateurs français au destin du parc nucléaire d’EDF par une forme de contrat de long terme de partage des risques et bénéfices, il faudrait préalablement décrire un peu le produit… et éventuellement obtenir leur accord.

Partie 2 – Orientations pour une nouvelle régulation économique du nucléaire existant

Commentaires

Le texte de consultation semble tenir pour acquis que l’exploitation du parc nucléaire relève de l’intérêt général au titre de la protection des consommateurs et du climat. Cette notion est pourtant contestable : outre les risques inhérents au nucléaire, de très nombreuses activités bien plus bénéfiques pour les consommateurs et le climat ne bénéficient pas de tant de sollicitude. On peut penser aux dessertes ferroviaires, à l’isolation des logements, aux économies d’énergie et bien entendu aux énergies renouvelables… notamment aux barrages hydrauliques.

Si nous mettons de côté le choix des mots et des symboles, essayer de transformer la production du parc nucléaire existant en service d’intérêt économique général n’a - en pratique - pas d’autre objectif que de pouvoir massivement déroger aux règles en matière de concurrence et d’aides d’Etat.
En effet, s’il s’agissait strictement de partager une rente avec les français, il aurait suffi d’indexer le plafond de l’ARENH sur le développement de la concurrence et l’évolution du parc... ou de taxer les revenus de l’activité nucléaire que l’on aurait préalablement distinguée du reste des comptes d’EDF.

La réalité est bien plus triviale : en maintenant coûte que coûte le parc nucléaire en fonctionnement alors même que cela exige des investissements massifs, que la consommation stagne et que le développement des énergies renouvelable se poursuit, EDF et le Gouvernement français savent parfaitement qu’ils s’exposent à une équation économique intenable puisque cela influence les prix de marché à la baisse. C’est bien les risques et le fardeau qu’il s’agit ici de partager. L’inclusion de Flamanville 3 dans le dispositif est curieuse puisqu’il qu’il ne s’agit pas d’un réacteur financé historiquement par les Français, ni d’un actif compétitif.
La comparaison établie avec les dispositifs de soutien du type complément de rémunération est un peu hasardeuse. En effet dans un cas, nous avons :
  Des filières émergentes bénéficiant d’un soutien borné dans le temps et pas « à vie »,
  dont les coûts de production sont très bien connus.
  Un tarif de référence fixé en amont au cours de processus compétitifs,
  avec une production librement écoulée.
  Un mécanisme de financement d’ordre fiscal.
Pour le parc nucléaire, il s’agit
  De réacteurs existant dont l’investissement initial est largement amorti
  dont les coûts de mise à niveau pour satisfaire aux obligations de sûreté ni même leur capacité à les atteindre restent largement incertains,
  dont la durée de vie réelle n’est absolument pas définie mais limitée selon la PPE à 10 ans après la 4ème visite décennale, paramètre qui peut évoluer puisque l’Etat n’a pas la possibilité de l’imposer à l’opérateur
  qui représentent une part prépondérante du parc de production
  des modalités de commercialisation administrées,
  avec un modèle financier beaucoup moins clair.
Par ailleurs, dans le cas des énergies renouvelables, il est assumé que ce sont bien des aides d’Etat.
Enfin, une « obligation de service public » visant à maximiser la production s’articule mal avec les impératifs de sûreté en exposant EDF à des surcoûts encore plus lourds qu’aujourd’hui en cas d’indisponibilité… ou une pression économique encore plus forte sur l’ASN. Il suffit de regarder les données sur la disponibilité réelle comparée aux données prévisionnelles pour comprendre l’ampleur du risque.

Réponses aux questions


Question 3 : Selon vous, quels effets une telle régulation est-elle susceptible d’avoir sur le fonctionnement des marchés ?

Notons préalablement que le dispositif envisagé est assez contradictoire avec les fondements même du marché européen de l’électricité tel qu’il se construit depuis plus de 20 ans et qui vise justement à permettre la baisse des coûts par rationalisation et mutualisation du parc de production… Comme pour de nombreuses initiatives françaises, on tente d’appliquer des mécanismes « compatibles avec le marché » dont les objectifs sont justement de s’en écarter… avec tous les dysfonctionnements et coûts que cela induit.
Sans élément d’information sur les volumes concernés ni les modalités de fixation des prix plafond et plancher, il est délicat de se prononcer sur l’impact sur les marchés de gros en dehors d’une tendance générale probablement à la baisse du fait d’une certitude de volume disponible dans un calendrier connu et bien sûr de financement garanti à EDF, réduisant ainsi un des éléments d’incertitude sur l’avenir du parc. Un phénomène d’adhérence à la zone de prix entre plafond et plancher (comme nous l’avons connu pour le prix de l’ARENH) ne serait par ailleurs pas surprenant. Cependant, il est également très probable que les inévitables tensions au moment de la fixation des paramètres clés ou en cas d’indisponibilité non prise en compte lors de la fixation du productible entraîneront une forte volatilité temporaire à la hausse. Enfin, le développement récent de contrats d’approvisionnement direct de long terme serait probablement tué dans l’œuf au détriment des producteurs.

Mais le principal impact à long terme viendrait du maintien en fonctionnement d’un très grand nombre de réacteurs nucléaires subventionnés et assujettis à une forme d’obligation de production au mépris des besoins réels d’approvisionnement et donc sans signal économique pour une immense partie du parc installé. Ce reproche a été fait aux dispositifs de soutien aux énergies renouvelables qui portaient pourtant sur des volumes bien moindres…

Du côté du marché de détail, les effets pourraient être très contrastés. Certains gros consommateurs y trouveraient probablement un élément positif de stabilité et de lissage des risques tandis que la capacité de diversification et de différenciation des offres des fournisseurs pour les petits consommateurs serait probablement contrariée par une nouvelle ligne de coût échappant à leur contrôle.

Enfin, la régulation proposée étant totalement asymétrique puisque même les fournisseurs ou clients ne s’approvisionnant pas ou marginalement sur le marché de gros se verraient contraints de partager les risques alors que la souscription au plafond est optionnelle, elle représenterait sans doute une forme d’entrave à la liberté du commerce difficile à justifier s’agissant d’un prélèvement obligatoire, difficilement prévisible, et ne relevant pas de la fiscalité…

Question 4 : Vous parait-il opportun au regard des objectifs poursuivis que la stabilité recherchée avec cette régulation maintienne sur le productible nucléaire une exposition partielle au prix de marché, et le cas échéant quel serait l’amplitude pertinente pour le corridor en €/MWh ?

Le document de consultation publique est totalement muet sur la méthode de calcul du plafond et du plancher de prix visés, ainsi que sur le volume concerné. L’exposition partielle au marché est de toute façon maintenue sur la production non intégrée au mécanisme mais il est évident que selon que nous parlons d’un volume de 100, 200 ou 300 TWh et de prix autour de 30, 40 ou 60 euros, la réponse ne peut être la même. Un corridor de 6 euros ne signifie pas grand-chose en soi mais et ne voit pas bien pourquoi en fixer un.


Question 5 : Un mécanisme reposant sur des règlements financiers parallèles à la cession des volumes sur les marchés tel que présenté ci-dessus vous paraît-il plus pertinent qu’un dispositif d’allocation physique ?

Un mécanisme financier et non pas physique est en effet théoriquement plus pertinent. Il est d’ailleurs intéressant de voir que c’est exactement cet usage de couverture [6] qui a été si violemment reproché aux fournisseurs dans le cas de l’ARENH que l’on veut généraliser. Le problème est que le système proposé est fort complexe et surtout difficilement défendable s’agissant de fournisseurs qui n’ont pas recours au marché organisé ou de façon extrêmement marginale à des fins d’équilibrage (et donc pas sur le ruban de base). Il ne fait aucun doute que le mécanisme proposé serait une nouvelle source inépuisable de contentieux…
Si ce mécanisme est si avantageux que cela, on ne voit pas bien pourquoi le risque n’est pas porté par l’Etat comme pour le financement des énergies renouvelables.

Question 6 : Dès lors que la régulation économique devrait garantir au-delà de 2025 la protection des consommateurs contre des hausses de prix qui seraient déconnectées de la réalité physique de l’approvisionnement électrique français en les faisant bénéficier de l’atout lié à l’investissement consenti dans le parc nucléaire existant, tout en donnant la capacité financière à EDF d’assurer l’exploitation et la maintenance de l’outil de production même dans des scénarios de prix bas, quelles autres dispositifs vous paraîtraient adaptés pour assurer cette double protection ?

Instituer un SIEG avec financement obligatoire des risques et partage optionnel des bénéfices n’est pas acceptable et totalement démesuré au regard de l’objectif de « protection » des consommateurs. Le gouvernement français ayant renoncé à faire approuver une simple méthode de calcul dans le cas de l’ARENH, on a bien du mal à penser que la négociation sur un tel dispositif puisse aboutir.

Rappelons que le prix de marché spot a un poids très marginal dans la facture d’un petit consommateur et que les grands consommateurs disposent de multiples outils de gestion du risque marché. En revanche, les prix de marché sont un révélateur de l’équilibre offre-demande qui doit participer à orienter les choix d’investissement des producteurs : obliger un opérateur à engager des investissements massifs au titre d’une obligation à produire pour 10 ans n’a aucun sens.

Par ailleurs, s’il s’avérait que les coûts de remise à niveau du parc s’envolent tandis que la durée de disponibilité décline (hypothèse assez probable au vu des dérapages systématiques de coûts et délais des arrêts de tranche), les prix pourraient ne pas suffire à couvrir les charges, ou être revus unilatéralement par l’Etat et exposer ainsi les consommateurs français à devoir financer des investissements n’ayant aucun sens économique.

Un dispositif de régulation engageant un financement public (direct ou indirect) ne peut être construit que sur une situation et une trajectoire du parc nucléaire clarifiée préalablement et transparente. Un SIEG est d’ailleurs conditionné au fait que le service et les coûts soient clairement définis. Nous en sommes loin.

Il serait probablement bien plus sain de réguler activement l’opérateur du parc nucléaire…