Alternative aux méthodes actuelles de production et de gestion des déchets et matières nucléaires Cahier d’acteur versé au Débat public Programme national de gestion des matières et déchets radioactifs 2019-2021

Les choix actuels sur la production et la gestion des déchets et matières nucléaires présentent de nombreux inconvénients, sur le plan des risques de sûreté et de sécurité et des pollutions qu’ils engendrent. Dans le cadre du débat public, ces choix doivent être discutés sur la base de propositions alternatives. Global Chance présente ces alternatives sur trois grands sujets : l’arrêt du retraitement des combustibles irradiés et donc de la production du plutonium et de l’utilisation du combustible MOX ; l’utilisation de l’entreposage à sec pour les combustibles irradiés, notamment MOX, en opposition à l’entreposage en piscine, après le temps nécessaire de refroidissement ; l’entreposage à sec en sub-surface des déchets de haute activité et moyenne activité à vie longue, en opposition au stockage géologique profond du projet Cigéo.

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ALTERNATIVE AUX MÉTHODES ACTUELLES DE PRODUCTION ET DE GESTION DES DÉCHETS ET MATIÈRES NUCLÉAIRES

Global Chance, Cahier d’acteur versé au Débat public Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs 2019-2021, mardi 18 juin 2019, 4 pages

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PRÉSENTATION GÉNÉRALE DU PROPOS DE GLOBAL CHANCE

Les choix actuels sur la production et la gestion des déchets et matières nucléaires présentent de nombreux inconvénients, sur le plan des risques de sûreté et de sécurité et des pollutions qu’ils engendrent. Dans le cadre du débat public, ces choix doivent être discutés sur la base de propositions alternatives. Global Chance présente ces alternatives sur trois grands sujets : l’arrêt du retraitement des combustibles irradiés et donc de la production du plutonium et de l’utilisation du combustible MOX ; l’utilisation de l’entreposage à sec pour les combustibles irradiés, notamment MOX, en opposition à l’entreposage en piscine, après le temps nécessaire de refroidissement ; l’entreposage à sec en sub-surface des déchets de haute activité et moyenne activité à vie longue, en opposition au stockage géologique profond du projet Cigéo.

Des quantités considérables de déchets et de matières nucléaires non utilisées et en grande majorité non utilisables, de tous ordres en termes de quantité, de niveau, de nature de leur radioactivité et de durée de celle-ci sont entreposées ou stockées dans un grand nombre de sites en France. L’engagement de la CNDP d’ouvrir le débat sur le PNGMDR à la présentation et la discussion de solutions alternatives à celles de la politique actuelle constitue un progrès important qui a permis à Global Chance de participer à ce débat. S’interroger sur la gestion de ces matières et déchets implique en effet d’examiner et de discuter de la façon dont ils sont produits, que cela soit lié à la nature même de la production d’électricité d’origine nucléaire ou au choix de techniques de traitement des combustibles. Nous présentons ici des alternatives aux choix actuels de retraitement et d’entreposage des combustibles irradiés, de gestion des déchets ultimes.

1. LE RETRAITEMENT DES COMBUSTIBLES IRRADIÉS

Dans la majorité des pays (États-Unis, Allemagne, Suède, Corée du Sud...), les combustibles irradiés sont des déchets ultimes. En France (au Royaume-Uni jusqu’à récemment et à un degré moindre en Russie), après un séjour de un à deux ans en piscine de réacteur, ils sont envoyés à l’usine de retraitement (La Hague) où sont séparés par voie chimique l’uranium (95%), le plutonium (1%), l’ensemble produits de fission et actinides mineurs (4%). Développée initialement pour les besoins militaires, la production de plutonium a été poursuivie et amplifiée pour fournir du combustible à la filière des "surgénérateurs" qui, sauf en Russie, s’est révélée un échec (États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Japon, France). En parallèle à cette utilisation aujourd’hui abandonnée, un nouveau combustible a été développé, le MOX, mélange d’oxydes d’uranium appauvri et de plutonium. Il reste cependant des quantités importantes de plutonium “séparé” à La Hague : 61 tonnes fin 2017, dont 46 appartenant à EDF et 15 au Japon.

Le retraitement ne diminue pas la radioactivité des déchets (et même l’augmente avec l’utilisation du MOX) mais disperse cette radioactivité en un grand nombre de types de déchets et matières dont chacun pose des problèmes particuliers de gestion, sans oublier les rejets radioactifs dans l’atmosphère et dans la mer et les risques de l’usine de La Hague en termes de sureté et de sécurité. Sa fonction a été et reste la production du plutonium. L’affirmation d’un taux de recyclage de 96% grâce au retraitement ne résiste pas à l’analyse : l’uranium de retraitement n’est pas recyclé et le plutonium se retrouve, pour les quatre cinquièmes en quantité, dans les combustibles MOX irradiés, qui ne sont pas retraités. La somme des activités du plutonium et des actinides mineurs du combustible MOX usé est multipliée par 8 par rapport à celle d’un combustible à l’uranium seul irradié. L’utilisation du MOX augmente les risques au niveau du fonctionnement des réacteurs, des transports de matières radioactives et des usines du combustible. Enfin, la production de plutonium au nom de la possibilité d’un renouveau du développement des réacteurs à neutrons rapides “surgénérateurs” ne se justifie pas : cette solution est sans avenir pour des raisons techniques, de sûreté et de coûts.

Le retraitement n’apporte aucune amélioration pour la gestion des déchets, bien au contraire. Il doit être arrêté, ce qui a pour conséquence directe l’arrêt de la production de plutonium et donc de l’utilisation du combustible MOX. La solution proposée est, après leur séjour en “piscine”, l’entreposage à sec pérenne des combustibles irradiés.

2. L’ENTREPOSAGE DES COMBUSTIBLES IRRADIÉS

Les combustibles irradiés sont entreposés quelques années dans des piscines de refroidissement attenantes aux réacteurs. Lorsque leur radioactivité et la chaleur qu’ils dégagent ont suffisamment diminué, la solution d’entreposage à sec a été retenue dans plusieurs pays. La France se distingue par son refus de cette option, tant pour les combustibles à uranium naturel enrichi, au nom du « retraitement », que pour les combustibles MOX qui ne sont pas retraités (et ne le seront très probablement jamais ). Cette position est d’autant plus étonnante qu’EDF vient de commander à l’entreprise américaine Holtec une installation de stockage à sec des combustibles irradiés de sa centrale de Sizewell au Royaume-Uni et que Orano se positionne sur le marché américain avec cette technique : sur les 75 sites d’entreposage à sec (26978 tonnes), Orano revendique d’être l’opérateur de 33. D’autre part, Holtec propose un nouveau modèle de conteneur à sec qui permettrait de réduire très fortement le temps de séjour en piscine.

Cette solution, parfaitement applicable aux combustibles à l’uranium seul irradiés est a priori plus difficile pour les combustibles MOX, dans la mesure où la possibilité d’entreposage à sec dépend de la puissance thermique des combustibles concernés, nettement plus élevée pour le MOX. Dans son rapport pour la CNDP, « Analyse des possibilités d’entreposage à sec de combustibles nucléaires usés de type MOX ou URE », l’IRSN dit que des solutions d’entreposage à sec s’appuyant sur des concepts actuels pourraient, dès à présent, être envisagées pour l’ensemble des combustibles MOX irradiés de teneur en plutonium égale à 5,3% et pour la plupart de ceux à 7,1% (2500 assemblages, soit 1154 tonnes). Il souligne que des évolutions envisageables des concepts existants permettraient de limiter à une dizaine d’années la période d’attente pour les premiers combustibles MOX irradiés mis en oeuvre depuis 2007 (teneur de 8,7%).

Ce rapport met sérieusement en question le projet d’EDF de construction d’une piscine centralisée pour l’entreposage des combustibles MOX irradiés.

L’entreposage à sec sur site de ces combustibles présente des avantages très nets en termes de coûts, de sûreté comme de sécurité, notamment face aux agressions extérieures naturelles ou malveillantes.

3. ALTERNATIVE AU PROJET CIGEO

A la logique du projet Cigeo d’enfouissement irréversible des déchets HA et MA-VL en couche argileuse profonde s’oppose la notion d’entreposage surveillé et pérennisé. La notion d’évolution (évolution scientifique et technique, évolution des esprits et des sociétés) est au cœur de cette proposition alternative. On rejoint ainsi l’association de deux des voies proposées par la loi de 1991 : associer l’entreposage à moyen terme en sub-surface à la poursuite de la recherche afin de réduire la nocivité et la durée de vie des déchets nucléaires les plus dangereux.

L’entreposage à sec existe déjà en France pour ces types de déchets : les déchets de haute activité et à vie longue (HA-VL), produits de fission et actinides mineurs, sont ”vitrifiés” et entreposés à sec à La Hague et un peu à Marcoule, dans des silos verticaux et refroidis par une ventilation naturelle et une ventilation forcée ; les déchets MA-VL, très majoritairement produits à La Hague et Marcoule, sont entreposés à sec et ventilés à Marcoule et surtout à La Hague, dans des installations nucléaires de base (INB) bien identifiées.

L’entreposage pérenne à sec et en sub-surface des déchets HA et MA-VL

L’entreposage pérenne ou de longue durée de surface ou souterrain, peut atteindre une durée de quelques centaines d’années. Après l’entreposage actuel pendant une période suffisante pour que leur température décroisse, les déchets HA (vitrifiés) et les déchets MA-VL pourraient être entreposés à sec dans un colis robuste (conteneur métallique à double paroi), une ventilation naturelle assurant la durabilité du colis par son refroidissement et un contrôle de l’humidité qui minimise la corrosion. La durée prévue pour cet entreposage serait de l’ordre de 300 ans. Une telle durée est de toute façon nécessaire pour assurer le contrôle et la maintenance des stockages existants (et à prévoir) des déchets nucléaires des centres de stockage de la Manche, de Soulaines et de Morvilliers. Il y aura donc, obligatoirement, des compétences consacrées à cette tâche qui pourraient également surveiller et contrôler l’entreposage des déchets HA et MA-VL. Orano aurait en projet des conteneurs à sec pouvant durer 300 ans, sans renouvellement.

La « sub-surface », consiste à entreposer les déchets HA-VL et MA-VL convenablement conditionnés à sec, dans des hangars creusés à faible profondeur ou dans le flanc de collines (meilleure accessibilité et bonne protection contre les agressions extérieures, naturelles ou malveillantes) dans des conditions de surveillance, de contrôle par inspection régulière et de garantie d’accessibilité, de récupérabilité (par exemple d’un conteneur défaillant) et de réversibilité. Le rapport de l’IRSN pour la CNDP, « Panorama international des recherches sur les alternatives au stockage géologique des déchets de haute et moyenne activité à vie longue », apporte un éclairage international très complet sur ce type d’entreposage assez couramment pratiqué ou envisagé.

La recherche

Le stockage pérenne en sub-surface permet de poursuivre la recherche sur la réduction de la nocivité des déchets radioactifs (radiotoxicité et durée de vie). Jusqu’ici, la composante « recherche » de la gestion des déchets radioactifs, a été concentrée sur le « séparation-transmutation », piste recommandée dès la loi sur les déchets de 1991. Le rapport de l’IRSN déjà cité présente de façon détaillée le principe de la transmutation ainsi que les procédés et stratégies de séparation développées au niveau international sur les procédés hydrométallurgiques et pyrochimiques, dont celles du CEA. Différents systèmes de transmutation sont présentés, dont le système ADS du CERN et le projet le plus avancé MYRRHA en Belgique, ainsi que la possible utilisation de la technique laser proposée par le prix Nobel de physique Gérard Mourou.

Rien n’interdit de penser que la recherche pourrait également ouvrir d’autres voies, inconnues jusqu’ici. La solution de l’entreposage à sec pérenne en sub-surface “donne du temps” aux physiciens pour découvrir et proposer une solution satisfaisante.

CONCLUSION

Une part essentielle en radioactivité des déchets des activités électronucléaires se trouve dans les combustibles irradiés issus des réacteurs. Alors que dans presque tous les pays, ces combustibles irradiés sont considérés comme des déchets ultimes, la France pratique le technique du retraitement dont l’objectif est l’extraction du plutonium qui est utilisé dans un nouveau combustible, le MOX, à son tour non retraité et constituant de fait un déchet, tout comme l’uranium de retraitement, tandis que les produits de fission et les actinides mineurs, provisoirement entreposés à La Hague, seraient destinés, avec les déchets de moyenne activité à vie longue, à être stockés, de façon irréversible, en couche argileuse profonde. Véritable « exception française », le retraitement multiplie les risques et les pollutions et pose des problèmes de sûreté, de sécurité, de santé publique et d’éthique par rapport aux générations présentes et futures. Pour en rester au seul problème de la gestion des déchets et sans aborder ici la cessation de leur production, trois propositions alternatives sont présentées : l’arrêt du retraitement et donc de la production du plutonium et du combustible MOX ; le choix de l’entreposage à sec pour les combustibles irradiés, à uranium enrichi ou MOX ; le choix de la combinaison de l’entreposage à sec en sub-surface pérenne (durée de l’ordre de 300 ans) et de programmes de recherche afin de réduire la nocivité et la durée de vie des éléments contenus dans les déchets de haute et moyenne activité à vie longue.

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Énergie, Environnement, Développement, Démocratie : changer de paradigme pour résoudre la quadrature du cercle (Manifeste publié en ligne le 1er mai 2014)

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