40 ans d’Efficacité Energétique en Californie : Effet Rosenfeld, un prélude aux Politiques de Changements Climatiques

, par   Jacques Roturier

Une décroissance parfaitement réussie ! Telle pourrait être, en résumé, la politique énergétique de la Californie. Désormais connue sous le nom de « Rosenfeld Effect », élaborée et conduite avec un réel succès dans le cadre de la première Transition Energétique (TE1), son résultat a très largement anticipé certaines des recommandations de l’Accord de Paris, (COP 21 Paris Décembre 2015). Celui-ci, à la suite d’une longue et difficile gestation, notamment après l’Accord de KYOTO (1997), a officialisé le renouveau de la seconde Transition Energétique (TE2). A l’opposé de la première, immense conséquence d’un conflit au Moyen-Orient à l’automne 1973, cette TE2 était plus qu’espérée par une large majorité de citoyens de la Planète. Elle a toutefois eu un point commun avec la précédente, le bouleversement des politiques énergétiques à peu près partout dans le monde, confirmant aussi de facto la priorité aux stratégies d’Offre d’Energie. La Demande d’Energie fut cependant, durant le dernier quart du XXème siècle, une option majeure en Californie mais aussi en Suède, les « Economies d’Energie » ayant, quant à elles, pris une part plus modeste à l’amélioration de l’intensité énergétique dans d’autres pays. Cette notable exception californienne est née de la volonté du Pr. Arthur H. Rosenfeld, très célèbre physicien du LBL (UC-Berkeley), de relever le défi de l’embargo via une analyse globale, en abordant de front les enjeux techniques, économiques et politiques y afférant. Ce programme de R-D, quasi-instantanément inventé, a rapidement suscité une politique très volontariste du Golden State dont résulte, 40 ans plus tard, un bilan triplement bénéfique à la fois sur le plan énergétique (consommation d’énergie inférieure de 33 % à la moyenne des Etats-Unis), réduction corrélative du coût financier et plus faible impact environnemental. Une synergie réellement paradoxale dans un pays où le dirigisme économique est, au mieux, une hérésie dont toutefois le succès, son contexte et sa mise en œuvre résumés ici, nous font fortement souhaiter que l’Efficacité Energétique devienne le socle principal des Politiques de Changement Climatiques.

INTRODUCTION [1]

Le monde entier est donc confronté à la deuxième Transition Energétique (désignée par la suite par le sigle TE 2). Bien qu’implicitement contenue dans la « Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques [2] » adoptée lors du Premier Sommet de la Terre à Rio-da-Janeiro en 1992, elle attendit plus d’un quart de siècle avant de devenir, avec l’Accord de Paris lors de la COP 21 en 2015, la priorité absolue du présent et du futur proche, tous pays confondus. Elle fut précédée, nul ne l’ignore, d’une première Transition Energétique (TE 1), brutalement survenue dans le contexte de la guerre israélo-arabe de 197. La TE-1 fut initiée en réponse à la décision des membres de l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) d’imposer un embargo sur les pays alliés d’Israël. Cette décision, spectaculaire manifestation de la globalisation de notre Planète au milieu de la deuxième moitié du XXème siècle, provoqua immédiatement une brutale augmentation du prix du baril de pétrole. Cela pouvait être d’ailleurs, le véritable objectif tant, par suite d’un nombre croissant de forages de puits de pétrole après la 2ème Guerre Mondiale, le prix du baril diminuait pour ne plus valoir que 3 USD environ. Si elle entraina la fin des 30 Glorieuses pour les pays industrialisés du monde occidental, elle eut des répercussions bien plus dramatiques pour ceux que l’on appelait alors Pays en Voie de Développement (PVD) et, à l’opposé, un très grand profit pour les producteurs, y compris les nouveaux venus. Entre autres conséquences, la plupart des pays industrialisés découvrirent ainsi, d’une part, leur vulnérabilité énergétique, véritable talon d’Achille que le coup de semonce de l’Affaire du Canal de Suez [3] en novembre 1956, hélas vite oublié, avait pourtant déjà démontré aux européens. Ils subirent, d’autre part, la multiplication par quatre du prix du baril en moins de 6 mois, d’octobre 1973 au printemps 1974, impactant toutes les politiques, notamment énergétiques. Ainsi débuta la première Transition Energétique (TE 1) qui, entre crainte de pénurie (d’où les « Economies d’Energie » et leur sort variable selon les pays), et dégradation de l’économie, bouleversa la Planète !

1. L’EFFET ROSENFELD

Toute ? « Non ! Un petit village résiste … [4] ». Ce « petit village » est le très renommé LBL - Lawrence Berkeley Laboratory (UC-Berkeley), une des plus fameuses universités des USA, au sein duquel dès l’annonce de l’embargo le 19 Octobre 1973, le Pr. A. H. Rosenfeld décide d’abandonner immédiatement ses recherches en cours et de relever le défi de l’embargo via une démarche originale instantanément théorisée :

  • définir et mettre en œuvre une analyse globale des besoins énergétiques, des gisements possibles de réduction via des technologies plus performantes existantes ou à inventer
  • démarcher tant les industriels que les pouvoirs publics afin de faire de ce projet un élément majeur du développement industriel et économique de l’Etat de Californie directement atteint, à la différence du Texas par exemple, par le choc pétrolier
    Cette démarche intellectuelle, aux résultats exceptionnels (Figure 1) est désormais connue sous le nom de « Effet Rosenfeld ». Elle repose sur trois points constituant à la fois la définition et le fondement de toute Politique de Maîtrise de la Demande d’Energie : (1) un relevé « en parallèle » des enjeux techniques, économiques et politiques ; (2) une réponse technologique apte à satisfaire tout service énergétique à moindres coûts financier et impact environnemental ; (3) un volontarisme inébranlable des autorités administratives et politiques compétentes.
Figure 1 - Consommation d’électricité per capita en Californie 1960-2010 et, en moyenne, aux Etats-Unis (source : newscenter.lbl.gov/.../27/art-rosenfeld-californias-godfather-energy-efficiency-90)
Figure montrant "l’effet Rosenfled", c’est à dire une consommation d’électricité par personne quasiment stable entre 1975 et 2010, autour de 8000 kWh/an/habitant pour l’État de Californie alors que la moyenne des États-Unis augmente régulièrement pour atteindre 13 000 kWh/an/habitant en 2010.

L’objectif de la TE 2 est clair : limiter l’accroissement de température de la Planète à 2°5 par rapport à l’ère préindustrielle (1°5 depuis 2015, avec l’Accord de Paris) qui, pour nombre de responsables politiques et l’opinion publique implique désormais d’éliminer rapidement tous les combustibles fossiles [5]. La chasse au dioxyde de carbone qui en découle dogmatise le zéro-carbone, une exigence difficilement prise en compte cependant car, bien qu’elle motive beaucoup de croyants, elle entraîne à ce jour encore trop peu d’acteurs importants suscitant, par contre, de puissants opposants. Compte-tenu des nombreux obstacles qui se dressent donc sur sa route et, en particulier, l’ambigüité manifeste du concept de zéro (ou bas-carbone [6]), est-il souhaitable, comme ce fut le cas durant la TE 1, de se limiter à changer d’énergie primaire en substituant les combustibles fossiles par de technologies nucléaires ou solaires agrémentées d’un zeste d’Economies d’Energie ?

A notre avis, le défi des Changements Climatiques ne fera pas l’économie d’une analyse politique de la démarche Rosenfeld qui, scientifique et technologique au départ, devint une remarquable synergie avec les responsables politiques et économiques du Golden State. Une superbe réussite dans cet Etat nord-américain dont le PIB n’a rien à envier à celui de plusieurs Etats européens ! N’y a-t-elle pas permis (Tableau 1), depuis plus de 40 ans, une réduction de 33 % de la consommation moyenne d’énergie par habitant par rapport à la moyenne des Etats-Unis, faisant ainsi du Golden State tout à la fois l’un des moins émetteurs de CO2 et l’un des plus performants en termes de PIB. Une réussite telle qu’à son décès en janvier 2017, ses collègues la baptisèrent « Rosenfeld Effect » du nom de celui qu’ils reconnaissent affectueusement comme le « Parrain » de l’Efficacité Energétique californienne.

Notre postulat est donc celui-ci : à l’instar de la démarche Rosenfeld et à l’opposé de la TE 1, la TE 2 doit faire de la Maîtrise de la Demande d’Energie sa priorité absolue, condition sine qua non, pour satisfaire l’aspiration aux moindres émissions de CO2. A l’appui de ce postulat, nous proposons de présenter et analyser ici les conditions ayant permis cette exceptionnelle synergie : un scientifique avec son labo et l’Etat de Californie. Son succès nous permet de souligner que le concept d’Efficacité Energétique, directement ou indirectement influencé, ou non, par la démarche Rosenfeld, est une condition sine qua non de la société bas-carbone.

Tableau 1 - Etats-Unis, Californie et Texas : données spécifiques par habitant
Tableau comparant la moyenne des Etats-Unis , la Californie et le Texas pour la consommation totale d’énergie, les émissions de CO2 et le PIB, la Californie montrant pour un PIB bien supérieur une consommation d’énergie et des émissions de CO2 bien moindres.

(Il est à noter que, aux États-Unis, les données énergétiques sont couramment données en btu. celles qui figurent ici (tableau 1, tableau 2 ou autres sont ici transcrites en tep ou, le cas échéant en kWh : 1mbtu = 293.1 kWh ou 2.52*10-6 tep. rappelons que la btu, à la fois unité de compte utilisée pour les contrats gaziers notamment aussi une unité physique caractérisant des volumes de gisements et/ou des quantités d’énergie, est ainsi définie : une btu (british thermal unit) est la quantité de chaleur qu’il faut apporter à une pound (env. 450 g) d’eau pour augmenter sa température de 1 degré f. en fait, 1 btu est très proche de 250 calories et/ou 1 kjoule.)

2. LE PR. ARTHUR HINTON ROSENFELD ET LA CALIFORNIE

La Californie est pour beaucoup cet Eldorado que fut, au sens strict le Golden State, lorsque la découverte de gisements d’or à la fin de la première moitié du XIXème siècle suscitait un afflux d’immigrants, les « Forty-Niners ». Depuis les années 1950, et aujourd’hui encore, mais pour d’autres raisons c’est toujours une des régions les plus attrayantes du monde [7]. Il serait de même impossible de citer et, a fortiori, décrire la totalité des actions résultant de cette politique énergétique. . Chercheurs et/ou ingénieurs, en particulier, affluent vers la Silicon Valley, l’Université de Stanford, le California Institute of Technology (CalTech), l’Université de Californie (Berkeley, San Francisco, Davis, Los Angeles, San Diego …. ), etc . Un engouement que justifie, entre autres, la réussite économique et industrielle de cet Etat, réussite sur laquelle le « Rosenfeld Effect » a peut-être eu quelque influence. Sous le titre « Economies d’Energie : l’Ecole de Berkeley » [8], nous avons autrefois présenté certains caractères spécifiques de la politique énergétique californienne post-TE 1 qui furent collectés lors d’une année sabbatique [9]. Vingt-cinq ans plus tard, validée par les faits, cette spécificité est telle que la Californie est aujourd’hui la preuve vivante de l’efficacité d’une politique volontariste de Maitrise de la Demande d’Energie. Celle-ci, incontestable ressource énergétique [10], y a satisfait toute Demande d’Energie à moindres coût financier et environnemental, ayant sans doute quelque peu contribué indirectement aux succès technologiques et économiques que chacun connaît.

Nous commenterons succinctement en section 3 ce succès exceptionnel, résultat de la démarche entreprise en Octobre 1973 par le Professeur Arthur H. Rosenfeld au Lawrence (National) Berkeley Laboratory (LBL - UC-Berkeley), chercheur aussi connu que respecté en Physique des Particules. Quelles raisons l’ont donc conduit à quitter cette discipline au sein de laquelle il jouait un rôle de premier plan ? Quelle fut la raison majeure de l’intérêt des autorités de l’Etat de Californie ? Comment, a-t-il entamé un processus débouchant sur cette réussite scientifique et économique démontrée par la Figure 1 et le Tableau 1. Sans oublier enfin que, tant du fait de sa remarquable personnalité que de l’aura de son laboratoire [11], cette démarche typiquement californienne a influencé, plus ou moins fortement certes, d’autres politiques énergétiques, un impact significatif dans la perspective des Nouvelles Politiques Energétiques comme cela sera brièvement esquissé plus loin.

Figure 2 - Baie de San Francisco : La ville de Berkeley, sur sa rive orientale, fait face au Golden Gate. Elle est reliée au centre de San Francisco via le Bay Bridge

Des différents critères qui ont contribué à l’Effet Rosenfeld, le premier est le Pr. Rosenfeld lui-même et le second, le prestige du LBL [12] où l’essentiel de sa carrière scientifique s’est déroulé. Deux autres facteurs nous paraissent être en lien avec la culture nord-américaine tels le poids constant du « Save Money », mot-clé de tout business mais aussi le pragmatisme, y compris en matière économique et intellectuelle. Le cinquième, indirect et quelque peu surprenant, est lié au développement industriel de la Baie de San Franciso (SF Bay Area). Quant au sixième, nous le résumerons à la fin de la section 3. Lorsqu’il fut recruté en 1954 à UC-Berkeley, Arthur H. Rosenfeld venait d’achever son Ph.D. à l’Université de Chicago, sous la direction du Pr Enrico Fermi [13], Prix Nobel de Physique en 1938, un des chercheurs qui en ces terribles années 1930 ont fait sortir la physique nucléaire du laboratoire pour devenir encore aujourd’hui l’enjeu (inquiétant ou bénéfique, c’est selon), que l’on sait.

Vivement recommandé, A.H. Rosenfeld rejoignit d’abord l’équipe dirigée par le Pr Luis Alvarez (Prix Nobel de Physique en 1968), puis en collaboration avec le Pr. Murray Gell-Mann [14], chercheur au CalTech, créa le Particle Data Group. Dans le cadre de cette structure internationale, il eut de nombreuses autres collaborations avec des chercheurs français et autres européens au Collège de France et au CERN, dont Théo Leray (Directeur de Recherches au CNRS), l’un des futurs responsables de l’Agence française pour la Maitrise de l’Energie (AFME) créée en 1982. Dans un tel contexte scientifique si exceptionnel [15], celui que chacun appelait Art (et même parfois « The Grand Art »), a fait preuve, ce soir d’octobre 1973 à la fois d’une large capacité d’anticipation et, un peu plus tard de ténacité et de force de conviction face à beaucoup de ses collègues !

Deux éléments de sa vie personnelle ont sans doute aussi contribué à cet étonnant revirement. Sa biographie [16] [17], raconte le premier. Ayant vécu quelque temps avec ses parents en Egypte, y ayant de fréquents contacts avec des enfants d’autres familles européennes, il constatait avec étonnement qu’utilisant beaucoup moins d’énergie que celle de sa propre famille, celles-là avaient un niveau de vie tout-à-fait comparable. Analyse surprenante de la part d’un enfant !

Le second, Art Rosenfeld prenait plaisir à le raconter. Nommé à UC-Berleley, il y arriva après la fin de la guerre de Corée qui avait succédé à celle du Pacifique. Ainsi, durant une bonne dizaine d’années, la rapide croissance des activités militaires et, par corollaire, celle du nombre d’entrepôts commerciaux et industriels, avait transformé la rive Est de la Baie occasionnant, entre autres, diverses formes de pollutions chimiques et biologiques. Ses collègues plus âgés, lui ayant tellement vanté les plaisirs familiaux qu’offraient les plages de la Baie, au pied des collines de Berkeley que, bien longtemps après, il ne décolèrait toujours pas de n’avoir pu en faire davantage bénéficier propres enfants car, hélas, ils en subissaient chaque fois les fâcheuses conséquences [18] . Colère ayant certainement déteint sur les chercheurs du laboratoire pour lesquels impacts environnementaux et réalités économiques étaient implicitement corrélés aux enjeux technologiques.

Cet aspect de la personnalité du Pr. Rosenfeld nous est apparu capital car, bien qu’il ne s’y soit peut-être jamais explicitement référé, son action s’inscrit clairement dans le « Penser globalement – Agir Localement » [19].

3. LE CONTEXTE ENERGETIQUE CALIFORNIEN DES ANNEES 1970

Avant l’embargo, les Etats-Unis et, en particulier, la Californie sont importateurs net de produits pétroliers, le cours du baril de pétrole étant alors particulièrement bas. Sur le plan environnemental, un certain nombre de catastrophes avait conduit le Pdt Nixon à créer EPA [20](Environment Protection Agency) en décembre 1970. Trois ans plus tard, quelques jours après l’annonce de l’embargo, avec le « Project Independance » [21] il annonçait une série de premières mesures destinées à faciliter la TE 1 grâce à des technologies moins gourmandes en pétrole. Intégrant l’augmentation significative des coûts de production, tous les producteurs d’électricité planifièrent donc la substitution du fioul par le charbon, disponible sur place en énormes quantités, ou le gaz naturel. Puis, comme la construction de 1000 centrales nucléaires y étant envisagée, à l’instar de la plupart des pays de l’OCDE, les programmes électronucléaires se développèrent progressivement avec toutefois une particularité spécifique, les lois antimonopolistiques imposant la concurrence entre différentes filières industrielles.

Ainsi, et compte-tenu de surcroit de l’apparition années après années, de nouvelles contraintes environnementales, les coûts et délais de livraison de ces technologies ont été bien plus importants qu’initialement prévu. Dans ce contexte, chacun des Etats a élaboré sa propre réponse à la crise du choc pétrolier de 1973, sous réserve évidement de leur compatibilité avec les lois fédérales [22] (US-DOE surtout) et du contrôle méticuleux exercé par chacune des Public Utility Commision (PUC) sur les entreprises privées en charge d’un service public (éducation, énergie, routes, santé, sécurité, etc). Pour ce faire, à la différence des autres Etats, avec le Warren-Alquist Act [23], la Californie a créé un organisme spécialisé, la California Energy Commission (CEC) [24].

Cependant, comme dans beaucoup d’autres Etats, bien que les programmes élecronucléaires y aient bénéficié d’une attention particulière, les centrales nucléaires existantes ou à construire ne furent pas efficacement en état de remédier à la crise énergétique !

Ainsi, en Californie, le site de San Onofre comportait, depuis 1967, un réacteur dont les dysfonctionnements imposèrent l’arrêt en 1992. Quant aux deux réacteurs PWR de 1200 MW de puissance électrique qui lui furent adjonts en 1983, ayant subi trop d’incidents et étant très contesté car proche de la faille de San Andreas, ils furent arrêtés en 2012. Le second site, Rancho Seco, a comporté un unique réacteur exploité à partir de 1973. Mais fonctionnant à 39 % seulement de sa capacité, il fut fermé en 1989. Enfin le troisième site, celui de Diablo Canyon est seul en activité aujourd’hui en Californie. Ses deux réacteurs PWR de 1100 MW, construits à partir de 1968 et 1970 respectivement ne furent mis en service, successivement, qu’en novembre 1984 et octobre 1985 demeurant autorisés jusqu’en 2024 et 2025. Ces 15 ans de décalage, entre début de construction et mise en service dus, entre autres, à la proximité avec 4 failles dont celle de San Andreas, ont entraîné un très réel surcoût de construction, impliquant ainsi un potentiel risque de pénurie. Un risque permanent à cette époque tel que dans le secteur résidentiel, l’auteur du fait de sa présence sur place en 1986-87, confirme ici ce qu’écrivait Le Monde en Octobre 1985 sous la plume de V. Maurus [25] : « …Devinette : quel est, dans le monde, l’Etat où tout acheteur d’un réfrigérateur particulièrement peu vorace en énergie reçoit un chèque de 400 F ? Où les foyers les plus pauvres bénéficient, sans même l’avoir demandé, de travaux d’isolation thermique totalement gratuits ? Où un hôpital touche 2 400 F par kilowatt d’abonnement électrique économisé, s’il fait construire des bâtiments neufs conformes aux normes thermiques prévues en 1987 ? C’est la Californie … ».

Risques financiers, engagements vis-à-vis de l’Etat et pragmatisme aidant, les producteurs ont été obligés de consentir des aides aux consommateurs afin d’utiliser au mieux leur propre capacité de production, plus faible que prévu, allant jusqu’à prodiguer de multiples conseils tels un encouragement à utiliser … un sèche-linge solaire (sic) ! Avec un effet pervers, au prix d’un énorme et regrettable contresens en France notamment, une partie de la classe politique a cru, sur la base de ces bien réels éléments liés toutefois à une conjoncture très particulières, pouvoir justifier un plus faible intérêt vis-à-vis de la Maîtrise de la Demande d’Energie.

Tableau 2 - Production & et Consommation d’Energie (2017 Source EIA a, https://www.eia.gov/state/seds/seds-data-complete.php?sid=CA)
Tableau montrant pour l’année 2017 que la Californie est importateur net d’énergie de près de 135 MTEP, quand le Texas est exportateur d’environ 100 MTEP, et la moyenne des Etats-Unis est importateur net d’environ 240 MTEP.

Terminons ce paragraphe avec ce Tableau 2. Il démontre la sixième raison ayant justifié, encore valable aujourd’hui, la raison fondamentale du soutien apporté par l’Etat de Californie à la démarche Rosenfeld : à l’inverse du Texas, le Golden State est, comme l’ensemble des Etats-Unis et bien d’autres pays au monde d’ailleurs, importateur NET d’énergie !

4. LES PREMIERS SUCCÈS

Dès l’annonce de l’embargo, la première préocupation du Pr Rosenfeld fut ainsi la mise en évidence du potentiel des économies d’électricité dans des bâtiments tel celui de son propre labo. Chaque soir après son diner, commençant sa seconde journée de travail, il se désespérait toujours d’y voir des milliers de tubes fluorescents illuminer des fenêtres de bureaux majoritairement vides à ces heures tardives. L’un de ses collègues du LBL, le Pr Samuel Berman, imagina et réalisa une technologie apte à réduire de 25 % la puissance nominale de chaque tube : le remplacement du ballast électromagnétique par un circuit électronique.Un test en vraie grandeur s’imposait qui, (difficilement) trouvé dans un bâtiment administratif du distributeur local d’électricité, fut spectaculairement réussi. Ce qui, de surcroît, ouvrit la porte à la miniaturisation des « tubes au néon » devenus ces lampes fluocompactes qui firent la fortune de leurs fabricants … (et leur déception ultérieure, notamment à cause du mercure qu’elles contiennent et aussi de l’avènement des diodes électroluminescentes [26]). Toutefois, ces lampes fluocompactes eurent, dans le San Francisco de 1987, un grand succès médiatique après la fin des célébrations du cinquantenaire du Bay-Bridge en 1986 (cf. Réf. 12 ).

Ce premier succès ayant convaincu la Pacific Gas & Electricity (P.G.& E), producteur et distributeur d’électricité local, plusieurs autres actions ont conforté la démarche Rosenfeld notamment la réussite de divers appels d’offres internationaux lancé par le LBL. L’un de ceux-ci, remporté par une entreprise européenne, visait à mettre sur le marché nord-américain des réfrigérateurs nettement plus performants afin de faire passer leur consommation moyenne, 1726 kWh/an, à moins de 600 kWh/an. Après cette initiative suivie d’effets positifs, vint un affrontement à très haut niveau avec les producteurs d’électricité et leur superviseur, la CEC. Avec ce combat épique, Art Rosenfeld entra dans l’arène politique dans un contexte d’expansionnisme électronucléaire un peu fou ! Un projet, demeuré aussi aberrant que célèbre, prévoyait ainsi d’y accroitre de 150 GW la capacité nucléaire ce qui eut entrainé, entre San Diego et San Francisco sur la Côte Pacifique, la présence d’un réacteur nucléaire tous les 5 km ! De façon plus réaliste toutefois, en 1975 les producteurs californiens sollicitèrent l’autorisation de construire de nouvelles centrales nucléaires, 17 GW au total, à coupler au réseau en 1987. Prétendant que 2 GW suffiraient, Art Rosenfeld se vit accuser d’incompétence par certains d’entre eux qui, s’adressant au Président de UC-Berkeley pour obtenir son licenciement, virent leur appel sèchement rejeté !

Son programme de recherches ainsi conforté, soutenu aussi par la croissance continue du prix du baril, il intensifia les trois temps de sa démarche : analyses précises des potentiels d’économies d’énergie, évaluation de leurs effets bénéfiques sur le plan environnemental, identification des moyens réglementaires requis. En 1987, savourant sa revanche puisque, comme prévu, la croissance de la puissance installée fut seulement de 2 GW, il encaissa un bonus significatif : une indéfectible notoriété auprès des autorités politiques californiennes d’abord. Puis, plus largement, notamment après la publication d’une autre étude intitulée : « Voluntary Californian Energy Policy versus Texas Laissez - Faire ». Comparant l’évolution respective de la production d’électricité de chacun de ces deux Etats sur la décennie 1985-1995, il y montrait qu’à PIB quasi-identique, la Californie avait accru de seulement 3 GW sa capacité de production d’électricité quand le Texas avait besoin de 12 GW. Un résultat qu’il résumait avec un plaisir non feint : sur la base de 2 000 USD/kW, ces 9 GW « évités » ont permis aux californiens d’investir, hors secteur énergie, 18 milliards USD dans des entreprises innovantes.

5. LA DÉCENNIE 1980

Art Rosenfeld a donc créé et dirigé au LBL, à partir du milieu des années 1970 le « Center for Building Science » (CBS) au sein de « Applied Science Division ». Comportant quatre programmes de R-D : « Energy Analysis », « Buildings Energy Systems », « Windows and Lighting », « Indoor Environment ». Plus de 200 chercheurs y travaillaient. Quant à lui, pendant plus de 25 ans, Art Rosenfeld a été personnellement la cheville ouvrière de DOE-2, un logiciel gratuit largement utilisé sur le continent nord-américain permettant, pour tous types de bâtiments, de calculer les consommations d’énergie et leur impact financier [27] avant même leur mise en service. Ne prétendant évidemment pas ici à l’exhaustivité, nous citons quatre des programmes de recherche qui y furent créés et nous présentons, à titre indicatif, certaines publications les concernant. Une liste complète des travaux publiés entre 1980 et 1988 est donnée dans le Rapport d’Activités 1988 du CBS (LBL Report- 27140) [28]. Par ailleurs, Art Rosenfeld a publié un résumé d’un quart de siècle des différents aspects de son œuvre : méthodologie, résultats scientifiques et impacts économique et politiques [29] :

  • « Ilots de Chaleur » : Mise en évidence pour la première fois par Hashem Akbari des écarts de températures de l’air, une différence élevée, de 2 à 4 degrés, simplement en comparant des relevés météorologiques en différentes partie d’une métropole, du centre ville à la périphérie. Un constat qu’accompagnaient des recommandations telles que l’utilisation de colorations claires pour les toitures et les voies de circulation urbaine, le développement de zones végétalisées [30], etc.
  • « Diagrammes de Coûts de Puissance Evitée (USD/kW) et de Coûts d’Energie Economisée (US cents/kW) » Développés par Alan Meier [31] (cf aussi Réf 12), leur principe est analogue à celui qu’utilisent les gestionnaires de réseaux électriques pour évaluer les coûts de production successiifs en fonction de la disponibilité de chaque centrale électrique utilisée. Un exemple, à l’échelle des Etats-Unis, est donné en Annexe 2 – A. Facilitant quantitativement l’évaluation précise des gisements correspondants, cet outil de travail permit notamment de démontrer à PG&E (cf Réf. 30) que le coût de la « Puissance Evitée » était de l’ordre de 290 USD/kW quand « construire » 1 kW coûterait 4 à 5 fois plus ! En 1985, ce travail a aussi servi de base à Florentin Krause (LBL) pour une mission de consultant auprès de l’Etat du Michigan également confronté aux tourments des programmes nucléaires (Consumer’s Power, l’un des principaux acteurs, fit faillite en 1984). Pour la première fois, le programme IRP (Integrated ResourcesPlanning), également appellé Least-Cost Utility Planning (LCUP) [32] [33], élaborés au LBL fut appliqué à un autre Etat, dans le cadre du Projet MEOS (Michigan State Option Studies) [34]. Il est à noter qu’un tel outil est également utilisable pour l’analyse du CO2 évité comme le montre la Figure 2 – B, transcription de la Figure 2 - A. Dans le contexte actuel, la Neutralité Carbone étant désormais clairement la cible, son usage devrait s’imposer systématiquement … A condition d’avoir une vision objective de l’unité de base, à savoir l’intensité carbone du kWh. Ceci exige, comme cela sera discuté dans une autre publication, une définition et une méthodologie de calcul identiques du kWh, qu’il soit d’origine fossile ou électrique, d’une part et/ou, d’autre part, « Consommé » et/ou « Evité ».
  • « Programmes Indoor Air Quality » Les premiers résultats visaient à mettre en évidence d’une part la contamination des locaux d’habitation et leur source : extérieure, par le radon par exemple, à cause de la porosité des constructions ou intérieure, liée à l’utilisation de substances chimiques industrielles dans l’entretien des lieux et/ou pour l’hygiène des occupants. Le champ d’études s’est évidemment élargi depuis les premiers travaux des années 1980 [35].
  • Impact des Technologies de l’Information sur la Demande d’Electricité. Cette étude fut commencée en 1986, une époque où 35 des 50 millions des ordinateurs de type PC construits dans le monde étaient utilisés aux Etats-Unis. Leur consommation d’électricité étant alors tenue pour négligeable, une première estimation faite au Building Energy Data Group du LBL [36] [37], démontra au contaire que cet impact énergétique étaait aussi élevé que celui de l’éclairage. Sur ce constat, s’est greffé une évidence, celle du rôle croissant qu’allaient inévitablement jouer les PC dans le mode entier, un ensemble d’équipements rapidement identifiés « Technologies de l’Information et de la Communication » (TIC). Une première présentation au monde industriel eut lieu à Götheburg (Suède) en 1989 [38]. A sa suite, le tryptique habituel au LBL s’est mis en place : contacts avec les fabricants, majoritairement californiens par chance, ainsi qu’avec la CEC et EPA, bien entendu. Contacts qui se conclurent en 1992 par une Conférence à San José (Californie) au cours de laquelle fut annoncé le Programme EPA-Energy Star et son premier label (obligation de prévoir, pour tous PC et périphériques, la possibilité de mise en veille).

Cette période a aussi été marquée par le spectaculaire changement de persprectives que fut la prise de conscience de l’accélération de la consommation d’énergie des pays comme la Chine et l’Inde qui, impactant l’approvisionnement mondial, a rendu plus complexe la Protection de l’ Environnement. C’est d’ailleurs à ce moment qu’émergèrent les inquiétudes relatives au Peak Oil [39]. Et que Mark Levine, Directeur du Energy Analysis Program au CBS, y créa le « US-China Clean Energy Research - Center Building Energy Efficiency » (CERC-BEE) en 1988 visant à étudier et promouvoir l’Efficacité Energétique en République Populaire de Chine [40]. Il y eut surtout cette très importante publication de l’équipe Lorius (Laboratoire de Glaciologie de Grenoble - France) [41] qui troubla profondément Rosenfeld (voir son commentaire au bas de la Figure Annexe 1- C : « … If this CO2 and CH4 are fed back into GCM’s [42], ΔT at 2xCO2 shoots from 3.5 ° to 8 °C … »). Simultanément, et ce n’est nullement un hasard, la Commission Bruntland soumettait aux Nations-Unes son rapport éponyme. Ainsi naquit en 1992 la Première Conférence des Nations-Unies sur le Développement Durable (UNCSD – Rio-da-Janeiro 1992), un domaine suscitant un fort engouement parmi les chercheurs du CBS. Toutes ces activités se développant rapidement, compte-tenu de la réorganisation en six secteurs (« Areas ») du LBL en LNBL (Lawrence National Berkeley Laboratory), le CBS devenu « Energy Technologies Area » (ETA) [43], était l’un d’entre eux. Avec un effectif total d’environ 800 personnes, ETA comporte lui-même 4 Divisions dont trois obéissent au modèle habituel : Building Technology and Urban Systems, Energy Analysis and Environmental Impacts, Energy Storage and Distributed Resources. Le quatrième, Cyclotron Road, du nom de l’un des anciens accélérateurs de particules du LBL, est une pépinière de jeunes entrepreneurs issus du monde de la recherche.

6. UNE CONCLUSION (TEMPORAIRE) POUR AUJOURD’HUI ET POUR DEMAIN

L’une des spécificités du Pr. A. H. Rosenfeld fut, comme nous l’avons indiqué, de faire du mot « Global » l’essence même de l’horizontalité de son action. Une autre fut, durant toute cette période, de recueillir l’appui unanime des responsables quelque aient pu être leurs propres choix politiques. C’est ainsi qu’en 2009, alors qu’il prit sa retraite, la California Public Utilities Commission (CPUC) prit une décision doublement exceptionnelle. D’abord en décidant [44] de fonder un programme d’Efficacité Energétique d’un montant très élevé (3,1 milliards $ US sur 3 ans) puis de le lui dédier en hommage à ses activités scientifiques et à sa parfaite collaboration.

Aujourd’hui, « The Grand Art » n’est plus, décédé quelques jours après la prise de fonction du Président Trump. Alors candidat, celui-ci, avait annoncé que l’une de ses premières décisions serait de mettre un terme aux mesures de Protection de l’Environnement antérieurement entreprises au niveau fédéral. Cela visait explicitement EPA dont Art Rosenfeld avait été un fervent soutien et son expert pour toute question relevant de l’Efficacité Energétique. Au rebours de cette regrettable décision idéologique, l’importance des nombreuses traces [45] que laisse le Pr. Rosenfeld est unanimement soulignée. Ainsi intitulée par un groupe de ses collègues [46], l’une d’elles est le « Rosenfeld », nom donné à une unité de compte équivalente à 3 GWh économisés soit la production annuelle d‘une centrale thermique au charbon de 500 MW. Ou encore son rôle en tant que Commissaire à la CEC (1994-99) ou Conseiller Scientifique (Senior Advisor) auprès du DOE (2000-2009).

Mais la plus notable de toutes ces traces, se retrouve dans l’hommage que lui ont rendu plusieurs de ses anciens étudiants, devenus collègues ou responsables politiques [47] comme l’un d’eux, Steven Chu ancien US - DoE Secretary (2009 et 2013) qui témoigne ainsi : « … The legacy of his impact is staggering. Before the 1973 OPEC Oil Embargo, electric use per capita in US as a whole and in California, in particular, was growing out of control at 5%/yr. The US responded remarkably to the oil shortage and price shock, and has reduced its electric growth rate to 1.5% per year, but that still adds up to a 50% increase from 1973 to 2012. California’s response has been even more remarkable. The State has frozen per capita electricity growth, despite huge electrification, by methodical introduction of advanced appliance and building standards and the creation of a $1B/yr energy efficiency program funded by a "public goods" charge on electric bills. This marked change in per capita energy was accurately identified as the "Rosenfeld Effect," which is continuing today, four decades later. California is now down to energy intensity levels comparable with Western Europe [48] ».

Pour s’en tenir au seul impact financier, crucial aux Etats-Unis, le bilan a été exceptionnel. Une analyse du Retour sur Investissements (Return On Investment - ROI) des subventions de US-DOE le prouve en effet. Démontré à partir de trois exemples de recherches effectuées au CBS (ballast électroniques H.F., lampes fluocompactes et vitrages faiblement émissifs), il est spectaculaire : avec 6 millions $ US du DOE, un bénéfice attendu de 83 milliards USD soit un ROI de 14 000 à 1 [49] ! Il est vrai, qu’importateur net d’énergie, l’Etat Californie n’avait pas le choix en 1973, se devant toujours aujourd’hui d’élaborer une stratégie de Transition Energétique assurant la croissance économique à moindre coût financier et contrainte environnementale. Objectif atteint grâce au fondateur de l’Ecole de Berkeley, démontrant ainsi qu’il est effectivement possible, à niveau de vie égal et à moindre impact environnemental d’accroître le PIB d’un pays développé avec une consommation, toutes énergies confondues, de 33 % inférieure à la moyenne US.

Sa marque de fabrique fut d’aborder « globalement » le problème posé non en le découpant en tranches successivement confiées pour l’une à la science, la seconde aux économistes ou aux industriels, la suivante aux écologistes et la dernière aux responsables politiques… mais de les prendre simultanément en en parallèle ! Comme nous l’avons noté, par rapport à la moyenne des Etats-Unis, cela a permis à la Californie de réinvestir hors énergies annuellement 16 Milliards USD tout en évitant l’émission de 120 Milliards de Tonnes de dioxyde de carbone. Pas d’autre explication depuis 40 ans, qu’une évidence : d’un strict point de vue économique, tous y ont compris que l’augmentation continue de la production d’électricité, jugée inéluctable auparavant, n’est plus la seule voie. Un argument universel que tout acteur des Nouvelles Politiques Energétiques pourrait méditer ? Comme le disait l’un d’entre eux : « … Beaucoup de nations industrielles sont probablement proches déjà, ou l’ont déjà dépassé, du seuil où poursuivre la croissance de la demande d’énergie sur la base des méthodes d’approvisionnement, des technologies d’usage final ou des schémas habituels commence à se traduire plus par des coûts marginaux élevés que de bénéfices. Face à une telle situation, le « En Avant Toute » habituel ne peut s’avérer la solution [50]… ».

L’Efficacité Energétique est fortement encouragée de l’AIE/IEA qui en souligne régulièrement l’importance dans les « World Energy Outlook » publiés annuellement et lui consacre depuis 2013 la série des « Energy Efficiency Reports ». De très importantes ONG internationales comme ACEEE et ECEEE [51] dont l’Efficacité Energétique est la raison d’être en sont également moteurs auprès des groupes industriels et commerciaux. En Europe, où elle connaît depuis peu une impulsion sans précédent dans plusieurs pays, la nouvelle Commission Européenne entend en faire un axe important de son « European Green Deal ». Tous, acteurs du « Save The Planet », mettent concrètement en œuvre son corollaire « Practice-What-You-Preach » [52].

Remerciements

Que les très nombreuses personnes ayant contribué à la réalisation de ce travail trouvent ici l’expression de mon immense gratitude. Tout d’abord, et pour beaucoup de raisons, Bernard Laponche qui, au début des années 1980, étant alors Directeur Général de l’AFME a accueilli favorablement ma demande de détachement auprès de la Délégation Régionale, puis accepté ma proposition d’année sabbatique au laboratoire du Pr. Rosenfeld qu’il a lui-même bien connu et, actuel Président de Global Chance (GC) m’a suggéré de l’écrire, m’accompagnant jusqu’à sa rédaction finale. Mes remerciements vont aussi à Edgar Blaustein (GC) qui a apporté à ce travail de nombreux et fructueux commentaires.

Cette année sabbatique au Center for Building Science (CBS LBL-UC Berkeley), a totalement réorienté mon activité scientifique au cours des 3 dernières décennies. Elle m’a permis d’y rencontrer, de bénéficier de leurs compétences puis, parfois, de retrouver plus tard certains d’entre eux : Jeffrey P. Harris, responsable du Bedgroup-CBS, Mary-Ann Piette, Akbari Hashem, Joe Eto, Florentin Krause, Alan Meier, Evan Mills ainsi que Olivier de la Morinière et Benoit Lebot, Au sein de l’Université de Bordeaux, à mon retour, la démarche Rosenfeld a été mon principal fil conducteur, pour des recherches infiniment certes moins ambitieuses, mais qui m’ont apporté le plaisir de collaborer avec Leila ben Ali, Dominique Beyrand, Jalil Elkari d’une part et, d’autre part, Michel Colombier et Patrick Faucher. A chacune et à chacun, un très grand Merci

C’est enfin mon infinie affection que je voudrais redire à Monique et Anne-Claire, auxquelles ce travail doit aussi d’avoir été effectué à Berkeley et enrichi depuis à Talence, grâce à leurs expériences personnelles et professionnelles, en d’innombrables échanges sur les enjeux humains des Politiques Climatiques ainsi que les éléments de solutions envisageables à titre individuel et collectif.

Annexe 2 - A
 : Référencées 2 - A, 2 - B et 2 – C, les 3 Figures ci-après sont extraites d’une brochure de 14 pages imprimées recto-verso constituée par A. H. Rosenfeld en 1993. Chacune des pages a été photocopiée à partir d’un document (draft, reprint ou autre) ayant pour auteur(s) un ou des chercheurs de du LBL dont lui-même dans certains cas, ou d’autres sources dument citées. Le Pr Rosenfeld remettait personnellement cette brochure, à ses visiteurs au LBL ou à ses interlocuteurs à l’extérieur, pour appuyer son argumentaire et justifier l’Efficacité Energétique. Beaucoup de ces feuillets on été annotés par lui et, par exemple, on identifiera sur la Figure 2 – A, face aux numéros 1 à 12, la technologie concourant à réduire la Demande d’Electricité
Annexe 2- B
 : Référencées 2 - A, 2 - B et 2 – C, les 3 Figures ci-après sont extraites d’une brochure de 14 pages imprimées recto-verso constituée par A. H. Rosenfeld en 1993. Chacune des pages a été photocopiée à partir d’un document (draft, reprint ou autre) ayant pour auteur(s) un ou des chercheurs de du LBL dont lui-même dans certains cas, ou d’autres sources dument citées. Le Pr Rosenfeld remettait personnellement cette brochure, à ses visiteurs au LBL ou à ses interlocuteurs à l’extérieur, pour appuyer son argumentaire et justifier l’Efficacité Energétique. Beaucoup de ces feuillets on été annotés par lui et, par exemple, on identifiera sur la Figure 2 – A, face aux numéros 1 à 12, la technologie concourant à réduire la Demande d’Electricité
Annexe 2- C
 : Référencées 2 - A, 2 - B et 2 – C, les 3 Figures ci-après sont extraites d’une brochure de 14 pages imprimées recto-verso constituée par A. H. Rosenfeld en 1993. Chacune des pages a été photocopiée à partir d’un document (draft, reprint ou autre) ayant pour auteur(s) un ou des chercheurs de du LBL dont lui-même dans certains cas, ou d’autres sources dument citées. Le Pr Rosenfeld remettait personnellement cette brochure, à ses visiteurs au LBL ou à ses interlocuteurs à l’extérieur, pour appuyer son argumentaire et justifier l’Efficacité Energétique. Beaucoup de ces feuillets on été annotés par lui et, par exemple, on identifiera sur la Figure 2 – A, face aux numéros 1 à 12, la technologie concourant à réduire la Demande d’Electricité

[1Le travail présenté ici a pour lointaine origine une année sabbatique effectuée en 1986 par l’auteur, alors Professeur à l‘Université de Bordeaux, au « Center for Building Science » créé par le Pr. A. H. Rosenfeld au LBL (UC-Berkeley). Il repose sur des documents scientifiques incontestables ainsi que sur des échanges informels entre l’auteur et le Pr. Rosenfeld, en diverses occasions. C’est en hommage et en expression de vive gratitude à cet immense chercheur, l’un des tout premiers au monde à répondre dans l’heure qui a suivi au défi de l’embargo d’octobre 1973, que ce travail est dédié. A cet hommage est aussi associée la mémoire de Benjamin Dessus, co-fondateur de Global Chance, l’un des pionniers en France de la Maitrise de la Demande d’Electricité et excellent analyste des enjeux environnementaux des Technologies de Production d’Electricité.

[2unfccc.int/resource/docs/convkp/convfr.pdf

[3Le président NASSER ayant, en juillet 1956, nationalisé le Canal de Suez par lequel les pays européens importaient l’essentiel de leur pétrole brut, une rupture d’approvisionnement se produisit qui dura environ quarante jours, temps mis par les tankers à contourner le Cap de Bonne Espérance. La crise prit vite fin grâce aux apports venus des USA et du Venezuela

[4Un plagiat ? Non ! Un hommage en signe de gratitude, à Goscinny et Uderzo pour l’hommage qu’ils rendent aux Hommes, et aux Mères Courage, qui se relèvent et font face à l’adversité.

[5Un souhait que l’AIE, dans son analyse prévisionnelle du mix énergétique en 2040 dans son World Outlook 2019, nuance quelque peu

[6Par exemple, alors que les émissions de CO² des combustibles fossiles sont calculées sur le lieu d’utilisation, dès lors qu’il s’agit de consommations d’électricité, elles le sont au contraire sur le site de production https://www.researchgate.net/project/Decarbonated-Electricity-End-Uses-Project-Assessing-the-actual-CO-kWhe-rate

[7La présente étude ne prétend évidemment pas être une analyse socio/ethnologique de la population californienne actuelle et/ou une complète analyse de l’évolution du contexte californien notamment celui des récents incendies

[8Economies d’Energie : l’Ecole de Berkeley, J. Roturier et E. Mills, La Recherche 22 229 p 256-266 Février 1991

[9Rapport Final de l’étude effectuée en exécution de la Lettre de commande 06 09 0118 adressée par l’AFME à Jacques Roturier (mission effectuée au LBL UC-Berkeley Aout 1986-Juillet 1987)

[10Le gisement d’économie d’énergie aux USA : Tendances, Perspective, et Propositions, E. Mills, J.P. Harris et A.H. Rosenfeld, Energie Internationale 1988-89 Editions IEPE Grenoble

[11https://www.lbl.gov/nobelists/ (douze Prix Nobel en Physique et Chimie sans compter les 23 membres du LBL qui, membres du GIEC/IPCC, obtinrent le Prix Nobel de la Paix en 2007)

[12https://www.lbl.gov/nobelists/ (douze Prix Nobel en Physique et e Chimie sans compter les 23 membres du LBL qui, membres du GIEC/IPCC, obtinrent le Prix Nobel de la Paix en 2007)

[13Enrico Fermi est une immense personnalité de la Physique contemporaine. Son nom a été donné à certaines particules de spin ½ (dites fermions) tels les électrons et quarks, par exemple comme aussi à une unité adaptée aux distances subatomiques (1 fermi soit 1 femtomètre (1fm) vaut 10-15 mètre). Sans oublier le Fermi National Accelerator Laboratory, le Fermi Gamma-ray Space Telescope ou un élément transuranien artificiel, le Fermium (Fm, Z=100).

[14Murray Gell-Mann, Nobelisé en 1969, a introduit le mot quark en physique (d’après Finnegans Wake, de James Joyce) pour caractériser les trois éléments constitutifs de chaque nucléon

[18Un certain Professeur H. Marcuse, alors à UC-San Diego, devant de tels dégâts environnementaux, ne pouvait qu’y trouver matière à justifier ses critiques du « progrès », thèse dont il est bien connu, qu’à la fin des années 1960 elle contribua à enflammer un certain nombre d’étudiants, un peu partout dans le monde , . .. y compris d’ailleurs à Berkeley, comme en Suède puis en France ! (https://en.wikipedia.org/wiki/Herbert_Marcuse#Post-war)

[19« Think globally – Act locally » : (NB « globally » et « « globalement » n’ont pas tout-à-fait le même sens bien qu’impliquant tous les deux la prise en compte par l’ensemble des acteurs de tous les éléments d’un problème. Leur différence tient à ce que Jacques Ellul, en ce qui le concerne, s’est toujours efforcé d’assurer cette prise en compte par lui-même. La démarche Rosenfeld procédait ainsi). Cet adage a pu, vraisemblablement, être énoncé par Ellul, penseur longtemps plus connu aux Etats-Unis qu’en France. Un chercheur bordelais, Jean-Philippe Qadri (éditeur d’un recueil posthume de textes inédits de l’auteur, Vivre et Penser la Liberté, Labor et Fides, 2019), nous a amicalement communiqué, qu’il en soit ici vivement remercié, quatre extraits d’entretiens donnés par cet auteur entre 1979 et 1994 dans lesquels cet adage est expressément cité comme le fil conducteur constant de sa pensée.

[20epa.gov/history

[25Le curieux pari américain, Véronique Maurus (Le Monde daté 28 Octobre 1985)

[27« … DOE-2 uses a description of the building layout, constructions, operating schedules, conditioning systems (lighting, HVAC, etc.) and utility rates provided by the user, along with weather data, to perform an hourly simulation of the building and to estimate utility bills… » (http://www.doe2.com/)

[29The art of energy efficiency : protecting the environment with better technology, Rosenfeld A H, An.Review of Energy and the Environment 24 (1999) pp 33-82

[30The potential of vegetation in reducing summer cooling loads in residential buildings" Akbari Hashem, Yu Joe Huang, Haider Taha, and Arthur H Rosenfeld, Journal of Climate and Applied Meteorology 26.9 (1987) 1103-1116

[31Supply Curves of Conserved Energy, Alan Meier, PhD Thesis (1982) – UC-Berkeley (LBL Report 14686) (https://digital.library.unt.edu/ark:/67531/metadc884880/m1/18/). Voir aussi : « The Economics Of Conserved-Energy "Supply" Curves », Steven Stoft, The Energy Journal 16(4):109-140 (October 1995)

[33« …IRP involves the integration of various demand side options in the supply mix during the planning process … » (réf 37)

[34Analysis of Michigan’s Demand-Side Electricity Resources in the Residential Sector Final Report (October 1986) LBL Report 23025

[36Energy Use and Efficiency of Elecronic Equipment, J.P. Harris, LBL Report 25558 (1988)

[37L. Norford, A. Hatcher, J.P. Harris, J. Roturier, O.Yu - Electricity Use in Information Technologies - An. Rev. of Energy 1990, 15, 423

[38Electronic Office Equipment : The Impact of Market Trends and Technology on End-Use Demand for Electricity, Les Norford, Ari Rabl, Jeffrey P. Harris, Jacques Roturier, Proc. Electricity Conference, Gothenburg (1989), Th. B. Johansson, B. Bodlund and R.W. Williams, Lund University ISBN 91-7966-065-7

[39Encircling the Peak of World Oil Production, R. Duncan, W. Youngquist, Natural Resources Research 8, N°3, 1999 (ce document prévoyait, au niveau mondial, un peak-oil en 2007 et une production de 30.64 Gigabarils, alors qu’en 2018, cette production a été 35. 66 Gigabarils (World Energy Outlook 2019)

[40Energy Use in Buildings : The U.S. Experience and Lessons for China - M.D. Levine, B. Adamson 1988

[41Greenhouse Warming, Climate Sensitivity and Ice Core Data, C. Lorius, J. Jouzel, D. Raynaud, J. Hansen and H. Treut (1990) Nature 347(6289)

[42GCM : Global Change Models

[44Decision D.09-09-047 on Sept. 24, 2009

[46artrosenfeld.lbl.gov/the-rosenfeld (simple clin d’œil dont ses 53 promoteurs savaient évidemment que, pas plus que le « gaspi » français, cette unité n’avait pas la plus petite chance d’être reconnue par le BIPM (Bureau International des Poids et Mesures).

[48Voir par exemple en fin du § 2 le rappel de son séjour, enfant, en Egypte !

[49Economics of Three New Energy Efficiency Technologies and Apliances Standards, Geller et Annual Review of Energy 1987, 2

[50P. Holdren in Energy Efficiency and Human Activity : Past Trends, Future Prospects p.34, Lee Schipper et al. Cambridge University Press, 1992 (ISBN 0 521 43297 9) - Cambridge University Press (1992) ISBN 0 521 46297 9 (ce paragraphe est traduit par l’auteur)

[51AC/ECEEE American/ European Council for an Energy-Efficient Economy

[52« Practice-What-You-Preach » est le sous-titre donné au rapport ECOCAMPUS remis en 1999 à sa demande, à la Commission Européenne (Programme SAVE/PACE) par un groupe de travail scientifique dont l’auteur eut le privilège de coordonner les activités sur la période 1996-99 au nom de l’Université de Bordeaux